Approche psychologique et aides techniques
Trop souvent banalisées ou ignorées, les répercussions psychologiques consécutives à l’acquisition d’une aide technique sont pourtant à prendre en compte…
L’exposé auquel j’ai assisté était présenté par Madame Dominique NADALINI, psychologue et neuropsychologue au centre Calvé à Berck-sur-Mer. Certaines réflexions sont issues des travaux menés par Jean-Sébastien Morvan, psychologue clinicien et professeur à la Sorbonne. Jean-Sébastien Morvan a rédigé un ouvrage sur le sujet en collaboration avec Valérie TOROSSIAN : Personnes handicapées et aides techniques, une approche psychologique.
Suite aux expériences de terrain vécues par les ergothérapeutes du centre Calvé, Madame NADALINI s’est interrogée sur l’approche psychologique des aides techniques. Quand l’ergothérapeute propose une aide technique, l’adhésion du patient n’est pas systématique. Pourquoi ? L’ergothérapeute peut penser que l’aide technique convient, qu’elle répond aux besoins. Pourtant, le patient n’est pas forcément prêt à en faire l’acquisition et ce, pour diverses raisons…
Les motivations du patient, qu’elles soient positives ou négatives, sont à considérer dans la démarche de conseil en aides techniques. Les motivations peuvent comporter les aspects suivants : curiosité, réticence (et ce, même si l’utilisation de l’aide technique est maîtrisée), méfiance, sentiment d’insécurité par rapport à la panne de l’appareil, ambivalence (« ça peut être intéressant, mais… »), distance (le patient met en avant ses capacités restantes ou il juge que l’aide technique est réservée à des personnes « plus handicapées que lui »).
Parallèlement à la motivation, d’autres aspects sont à prendre en compte. Quelle représentation se fait la personne de l’aide technique ? Une aide ou un objet qui marque son handicap ? Quelles sont ses perspectives d’avenir et d’autonomie ? Quel est le vécu du handicap ? Dans quelle phase de deuil se situe la personne ? On en distingue 3 principales : le choc, la désorganisation et la réorganisation. La personne sera plus à même de réfléchir sur son projet de vie en période de réorganisation.
Quel rapport le patient entretient-il avec son corps ? L’aide technique peut être considérée de façon positive comme un prolongement bénéfique du corps ou de façon négative comme un substitut intrusif.
L’environnement physique est bien évidemment un critère à prendre en compte dans le conseil. L’aide technique permet d’agir et d’interagir avec l’environnement, elle permet d’accéder à un champ d’action et à un espace de liberté et d’intimité.
L’entourage familial et social est également très important. L’aide technique peut être synonyme d’isolement : le geste n’est plus réalisé par une tierce personne mais avec l’aide d’un objet. L’entourage peut avoir une attitude de protection : il veut aider la personne en situation de handicap en permanence et refuse d’être suppléé par une aide technique pour les actes de la vie quotidienne. Au contraire, l’aide technique peut libérer d’un environnement social ou familial trop envahissant.
L’aide technique comme évoqué précédemment stigmatise le handicap. La peur du regard des autres peut être un frein à l’acquisition de l’aide technique.
Face à ce constat, Morvan fait un certain nombre de recommandations :
- Il est nécessaire d’apporter les informations relatives à l’aide technique à la personne en situation de handicap et à son entourage familial et social, y compris le personnel soignant. Il est également opportun de sensibiliser les intervenants professionnels à l’ensemble des éléments psychologiques et des dynamiques en jeu dans la relation homme/machine.
- L’analyse des motivations est importante.
- Les premières utilisations doivent être accompagnées.
Pour conclure, nous pouvons dire que l’aide technique prend un sens dans et par la relation. Il faut faire attention à la façon dont l’aide technique est présentée et bien avoir à l’esprit que l’acquisition de l’aide technique nécessite de faire de nouveaux apprentissages.
Cécile QUANTIN-ANSELME
Service Documentation
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