L’interface de communication ou Aide à la communication

Dans le but d’éclairer un maximum de personnes sur des professions méconnues et peu développées, je suis allée à la rencontre des « interfaces de communication » pour les personnes sourdes.

Je me suis alors rendue à l’Association SOURDMEDIA à Wasquehal. J’y ai rencontré Marine EYSSETTE, coordinatrice des interfaces de communication du Service d’Appui à l’Emploi (SAE), et Laurence THOORIS, aide à la communication au Service d’Accompagnement à la Vie Sociale (SAVS).

Marine EYSSETTE nous présente les spécificités du travail d’interface de communication :

«Le rôle de l’interface de communication est avant tout de faire le lien entre la personne entendante et la personne sourde.

Faire le lien au niveau de la communication bien sûr, s’assurer que le message soit compris, le rendre accessible, l’adapter en fonction des acquis du bénéficiaire… et ce en utilisant tous les outils nécessaires (dessins, mimes, langue des signes, codes divers…)  mais aussi faire le lien culturel, le pont entre les deux cultures, expliquer l’importance du visuel par exemple…

L’interface est vraiment là pour les deux personnes. L’idée n’est pas de traduire simplement l’entretien mais de faire en sorte que la personne sourde et la personne entendante rentrent en contact direct, d’alléger les a priori de l’un sur l’autre, mettre en place des outils, conseiller : «  tournez votre écran, vous en êtes à la deuxième annonce, montrez la, expliquez ce que vous faites, rendez la visuelle, aérez la ».

Souvent, la demande initiale du prescripteur est : « vous pouvez venir? C’est pour une traduction. » C’est normal, ils ne voient pas ce que cela pourrait être d’autre. « Je ne vous ai pas appelé car il parle » Oui mais il est toujours aussi sourd! Ce n’est pas parce qu’une personne sourde sait parler, sait « oraliser » que pour autant elle entend plus. Ce sont les pièges de l‘oralisation !! La lecture labiale reste très fatigante,  elle n’est jamais optimale.

Etre sourd ne signifie pas uniquement avoir « les oreilles cassées ».

«Etre sourd c’est avoir un autre mode de communication, une culture et une vision des choses qui est différente…»

Une bonne connaissance de tous ces facteurs constituera la base d’un meilleur échange.

Le rôle de l’aide à la communication au SAVS est identique dans le sens où nous sommes un lien, une aide entre la personne sourde et le professionnel entendant.

Par ailleurs, il nous arrive fréquemment de répondre à des demandes de personnes qui souhaitent une explication sur un document administratif reçu par exemple. L’intervention auprès du professionnel n’est pas nécessaire dans ce cas. D’autres situations entrainent l’intervention de l’aide à la communication lorsque (et c’est de plus en plus le cas) il faut répondre à une demande par téléphone, inaccessible à une personne sourde (hotline, Service Après Vente, …).»

Comment savoir quel professionnel de votre équipe envoyer en rendez-vous?

Quel professionnel, pour quelle communication par rapport à quelle situation?  Notre équipe s’adapte à la demande.  Chaque situation a sa spécificité.

Dans le cas d’une première rencontre, chaque professionnel (interprète, interface, médiateur…) est en mesure d’évaluer le degré d’autonomie, le mode de communication, les besoins, les connaissances du milieu professionnel de la personne et ainsi rediriger vers le professionnel le plus adapté.

Une même personne peut être accompagnée par plusieurs professionnels de l’Association et ainsi faire intervenir un interprète et une interface en même temps pour un même rendez-vous.

Vous intervenez à chaque rendez-vous?

L’objectif de l’interface étant de mettre en place de bons outils de communication entre la personne sourde et la personne entendante, son intervention n’est pas systématique. Mais tout cela, encore une fois, dépend de chaque situation.

Une personne sourde autonome avec une communication en langue des signes française pure nécessitera l’intervention d’un interprète pour la traduction.

En revanche, une personne sourde ayant des difficultés de compréhension, d’intégration, de connaissances justifiera davantage la présence d’une interface de communication.

La présence de l’interface de communication n’est pas toujours bien claire. En effet, il s’agit  d’une tierce personne qui conseille et donne les outils techniques de communication  mais qui en aucun cas ne se substitue au professionnel en charge du suivi (conseiller en insertion, formateur…)

Comment devient-t-on interface de communication ou aide à la communication?

Il n’existe pas à ce jour de formation initiale. Le recrutement tend à se généraliser sur la base d’un bac+3 quel qu’il soit (linguistique, psycho, travailleur social…) pour le bagage de culture générale qu’il représente, mais aussi sur une bonne maîtrise de la langue des signes française.Le métier bouge au niveau national. Une formation possible pourrait s’ouvrir : atelier national pour la reconnaissance du métier (convention 66 notamment) et de la formation, en place depuis 1 an.

L’interface est avant tout un travailleur social, un expert surdité, et non un expert linguistique.

Qu’est-ce que SOURDMEDIA ?

C’est une Association créée en 1998, proposant 3 services ;

Un SAVS (Service d’Accompagnement à la Vie Sociale).

Il est financé par le Conseil Général du Nord. Ses professionnels interviennent dans ce département. Il est composé d’une équipe pluridisciplinaire (aide à la communication, médiateurs, psychologues, interprètes …)

Le réseau « sourd et santé ». La mission de ce service est de faciliter l’accès aux soins de santé pour les adultes présentant une déficience auditive dans la Région Nord Pas-de-Calais. Le réseau est en partenariat avec SOURDMEDIA, le Groupe Hospitalier de l’Institut Catholique de Lille et la Fédération Nationale des Sourds de France. Il se présente sous la forme de permanences de psychologues accompagnés par des interprètes en langues des signes, d’animateurs médiateurs et de travailleurs sociaux bilingues.

Un SAE (Service d’Appui à l’Emploi)  a été créé en Avril 2008. Ce service est lui aussi constitué par une équipe pluridisciplinaire composée d’interfaces de communication, d’interprètes français-langue des signes, d’un médiateur, d’un professeur de Langue des Signes, d’un psychologue, d’un ergonome…  Son objectif est de venir en appui des structures existantes telles que les Cap emploi, Pôle Emploi, la Médecine du travail, le Service d’Aide au Maintien dans l’Emploi des Travailleurs Handicapés (SAMETH)… et d’apporter une complémentarité quant à la surdité. Il est financé par l’Association de Gestion du Fonds pour l’Insertion professionnelle des Personnes Handicapées  (AGEFIPH) au niveau régional. Ses professionnels interviennent donc dans les deux départements, le Nord et le Pas-de-Calais.

Quel est le délai d’intervention ?

Tout dépend de la demande, toujours au plus tôt en fonction des plannings, sachant que les entretiens d’embauche restent prioritaires. Pour ce qui est de l’accompagnement social, il n’y a pas de délai puisqu’il y a une permanence chaque après-midi à l’Association et chaque personne sourde ayant une demande urgente peut se rendre à cette permanence sans rendez-vous. Le reste du temps les rencontres se font sur rendez-vous sur le site ou chez les partenaires (Unité Territoriale de Prévention d’Action Sanitaire et Sociale, Caisses d’Allocations Familiales, …)

Une fois la personne sourde embauchée dans l’entreprise, l’accompagnement continue-t-il  pour le SAE ?

Oui, quand bien même nous accordons la priorité aux personnes demandeurs d’emploi, nous intervenons aussi en entreprise, à la demande. Soit du Pôle Emploi ou Cap Emploi, qui accompagnent la personne jusqu’à la fin de sa période d’essai (démarrage, intégration, sensibilisation de l’équipe, mise en place des outils de communication..) soit, de la cellule maintien ou de la médecine du travail, qui peuvent proposer à la personne un accompagnement spécifique afin de renforcer les outils mis en place.

Qu’en est-il des personnes accompagnées par le SAVS ?

Il est important de préciser que pour bénéficier d’un accompagnement par notre service, la personne sourde doit avoir obtenu une reconnaissance auprès de la Maison Départementale des Personnes Handicapées (MDPH) pour un accompagnement. Sans ce « sésame », nous ne pouvons pas intervenir sur le long terme.

Il nous arrive de répondre à une demande urgente sans que la personne sourde ait cette reconnaissance. Dans ce cas, nous l’aidons à remplir le formulaire pour que l’accompagnement puisse se poursuivre.

Tous les prescripteurs ou partenaires vous connaissent ?

Oui, pour la plupart d’entre eux. Cependant, il est nécessaire de leur rappeler régulièrement nos missions et nos compétences, notamment lorsque leur équipe se renforce, lors d’un premier accueil d’une personne sourde.

Les personnes sourdes informent elles aussi la structure de notre existence, et demandent que nous soyons sollicités lors du prochain rendez-vous…

Et vous accompagnez aussi les personnes sourdes qui veulent travailler dans la fonction publique ?

Oui, c’est le Fonds pour l’Insertion des Personnes Handicapées dans la Fonction Publique (FIPHFP) qui prend le relais sur l’AGEFIPH pour le SAE

Comment se passe un accompagnement ?

Pour le SAE, le prescripteur contacte SOURDMEDIA pour intervenir en qualité « d’expert surdité » tout au long du parcours professionnel du bénéficiaire (rendez-vous pôle emploi, formations, entretiens d’embauche…)

Sourdmédia

45 Avenue de Flandre

59290 Wasquehal

Téléphone : 03.20.17.16.10  – Fax : 03.20.17.16.15

contact@sourdmedia.fr

Eve BOISMAIN – HACAVIE

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